Paul Biya, 92 ans et plus vieux président du monde, a été réélu à la tête du Cameroun après déjà 40 ans au pouvoir. Avec 53,6% des suffrages selon les chiffres officiels annoncés le 27 octobre, le Conseil Constitutionnel l’a proclamé vainqueur devant son ancien premier ministre et principal adversaire, Issa Tchiroma Bakary. Promettant d’être un « président de transition », ce dernier a su profiter de l’impopularité de Biya, figure d’un gouvernement corrompu et autoritaire, plus souvent à Genève que sur le sol camerounais. Issa Tchiroma Bakary avait déjà contesté les résultats avant leur annonce, en appelant à des mobilisations pacifiques qui ont été violemment réprimées. L’armée, tirant à balles réelles, a déjà fait plusieurs morts.
Au-delà des chiffres officiels, ces élections ont été marquées par un regain d’intérêt des Camerounais-es. Longtemps désabusé-es face au processus électoral verrouillé, ils et elles ont voté massivement, surveillé les urnes et tenté de contenir la fraude. Car la lassitude est profonde. En cause, des décennies de mauvaise gouvernance et des richesses pillées pour les intérêts impérialistes. Aujourd’hui, plusieurs entreprises étrangères ont des parts importantes dans des secteurs clés comme la culture de banane, dont le français Compagnie fruitière assurait près de 80% des exportations en 2024.
Malgré d’importantes ressources naturelles, près de 23% de la population vivait sous le seuil international d’extrême pauvreté en 2022. Plus d’un tiers des moins de 18 ans, qui représentent près de la moitié de la population, est exposé au chômage. Les services publics sont dégradés, et les travaux d’infrastructures avancent au ralenti. Pour rester au pouvoir, le président n’a plus que la brutalité de l’armée et la corruption d’une élite politique vieillissante.
Laura Mermoud
