Dominique de Villepin est toujours de droite

, Numéro 2

On le sentait venir depuis un moment : Dominique de Villepin a lancé le 24 juin son nouveau parti politique : « La France Humaniste ». Il ne cache pas ses ambitions, tournées vers la présidentielle de 2027. Les divers comptes « Avec Villepin » ou autres outils de communication à son service apparus sur les réseaux sociaux l’année dernière, sont encore plus clairs : sa campagne est bel et bien lancée.

Longtemps à l’écart de la vie politique, l’ancien premier ministre de Chirac de 2005 à 2007, d’aujourd’hui 71 ans, s’est fait remarquer ces derniers mois pour ses prises de position médiatiques sur Gaza ou sur la colonisation israélienne en Cisjordanie, et sur la politique diplomatique française en général. En cela, il fait écho à ce qui est resté un moment politique marquant dans la mémoire de beaucoup de gens, y compris de gauche : son discours à l’ONU en 2003, expliquant le refus de la France de s’engager dans une guerre en Irak, alors que tous les autres alliés des États-Unis les suivaient.

Clairement, Villepin cherche à séduire à gauche, au-delà de son camp traditionnel. Il perçoit qu’une partie de la popularité de la France insoumise vient de ses positionnements sur la Palestine, et pense pouvoir séduire une partie de ses électeur-ices. Mais malgré ce petit twist sur les questions géopolitiques, il se place surtout, comme Edouard Philippe ou Gabriel Attal, dans la course pour conquérir l’espace que laissera à droite Emmanuel Macron en 2027. La constitution lui interdit de briguer un troisième mandat, et le parti LR fait sauter toutes les distinctions idéologiques avec l’extrême-droite.

Il a compris cependant que pour reconstituer un vrai soutien à cette droite gaulliste, il fallait tenir compte du rejet du macronisme, et donc se distinguer de son bilan. Il va ainsi d’esbroufe en esbroufe : il propose, ce 25 juin sur France Inter, d’abroger la réforme des retraites d’Elisabeth Borne et l’âge de départ à 64 ans… pour mettre en place la retraite à points, à savoir le projet de réforme des retraites d’Emmanuel Macron en 2019, dont la pandémie de Covid19 avait empếché d’être adopté. 

Mais cela ne surprend personne, car Villepin, ce n’est pas seulement le refus de la guerre en Irak. C’est aussi, en 2006, le CPE, contrat première embauche, attaque majeure du droit du travail, donnant lieu au plus important mouvement social de la décennie 2000-2010. Trois millions de personnes dans les rues avaient alors poussé le premier ministre à renoncer d’appliquer son projet de loi. Celui qui prétend « défendre la justice sociale et l’ordre républicain », n’a en réalité pas vraiment changé : il est toujours de droite.

Dominique de Villepin, dans Le Parisien cette fois-ci, dit vouloir « une politique d’équilibre et de mesure ». Sur un plan moral, il veut se présenter comme distinct de l’extrême-droite. Il critique donc Retailleau, affirmant une besoin « de plus de professionnalisme et de moins de surenchère sur les plateaux télé » pour « la responsabilité qui est la sienne, qui est la sécurité des Français et de renvoyer les OQTF ». Expulser les étrangers aussi, donc, mais en silence.

La multiplication des ambitions personnelles, le manque de clarté et les rangs dispersés à droite, ne sont pas forcément une mauvaise nouvelle pour la gauche. Tant qu’on est bien clair sur qui est de droite.

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